A l’heure où la plupart du monde est confiné, nous nous sommes entretenus sur la situation avec quatre de nos éditeurs de luminaires, qui poursuivent leur activité malgré la crise : Entrelacs, Atelier Areti, Magic Circus Editions et Pedret.
Ces activités ne sont certes pas primordiales, comme le sont les secteurs sanitaires et alimentaires ; mais le fait de maintenir la productivité, en mettant en place tous les mesures de protection possibles, ne contribue-il pas aussi quelque part à l’effort collectif ?
Chacune des quatre sociétés, qui a contribué à cet article, fabrique dans un pays européen différent (Entrelacs en France, Atelier Areti en Allemagne, Magic Circus Editions au Portugal et Pedret en Espagne). Alors que nous pensions que des différences en ressortiraient, ce sont plutôt de grandes similitudes qui se dessinent…
Quelle est la situation dans votre pays actuellement ?
ENTRELACS (Paul Macheret) : “La tendance est positive en France concernant le nombre d’admis aux hôpitaux, mais ces derniers restent en forte tension, le confinement reste d’actualité pour le moment jusqu’au 11 mai. Depuis le 17 mars, les entreprises de première nécessité et celles qui peuvent respecter les barrières travaillent.”
PEDRET (Pedro Pedret) “Le gouvernement espagnol a déclaré un état d’urgence le 16 mars. Connaissant la situation en Italie, cela est venu trop tard, avec Madrid pour cible principal. Afin d’essayer de contrôler la situation, le gouvernement a décreté 2 semaines de congés payés obligatoires jusqu’au lundi de Pâques. Cependant, cela ne peut pas être considéré comme des vacances ! Ils ne comprennent pas cela. Aujourd’hui, la situation est la même qu’au début de la crise. Nous sommes tous confinés à la maison, mais peuvent aller travailler les personnels des commerces alimentaires, des pharmacies, et de l’industrie et le bâtiment. Tout travail pouvant être effectué à distance doit l’être.”
ATELIER ARETI (Lucy Hales) “L’Allemagne aussi est confinée, avec toutes les écoles et la plupart des grandes boutiques fermées. Les plus petits commerces peuvent rester ouverts. Autant de personnes que possible doivent être en télétravail. Si on doit aller travailler, on doit respecter un distance minimum de 2 mètres et les sociétés doivent fournir un gel hydro-alcoolique.”
MAGIC CIRCUS (Marie-Lise Féry) “Le Portugal (et plus précisément le nord du pays) n’a pas été aussi fortement impacté que les autres pays européens (l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et bien entendu, la France…)”
Comment vous êtes-vous organisés pour continuer la production malgré le confinement ?
ENTRELACS “Tout d’abord nous ne déplorons aucun malade parmi nos collaborateurs, ni dans leur environnement proche, tant mieux. Notre atelier est grand, mais il n’y a pas assez d’espaces de circulation, notamment dans les lieux communs. Nous avons pris la décision de rester ouvert, avec 25% de l’équipe de production sur la base du volontariat. Il est pour nous important de livrer nos clients, même si respecter les délais s’annonce un peu plus compliqué. Cette équipe de 5 personnes est renouvelée toutes les deux semaines, afin que chacun puisse garder un lien actif pendant cette période pénible. Nous appelons les collaborateurs isolés pour prendre de leurs nouvelles, et envoyons un mail hebdomadaire à l’ensemble des collaborateurs afin de les tenir informés de la vie à l’atelier. C’est un moment de partage sur un ton souriant.”
ATELIER ARETI “Nous travaillons avec trois fabricants en total, mais il y a un en particulier qui fabrique presque tous nos pièces. Dans cette manufacture, il y a 8 employés pour une surface de 4000m2, donc c’est facile de respecter les distance minimums ! De plus, 4 des 8 personnes sont d’une même famille, et vivent ensemble. Les 4 “extérieurs” ont chacun leurs propres poste de travail et outils.”
PEDRET “Chez Pedret nous avons pu continuer malgré la période de congés obligatoires, car nous sommes une entreprise familiale. Avec mes deux frères, nous avons continué notre activé seuls, sans nos salariés. Nous appliquons tous les règles (se laver les mains très régulièrement, garder une distance minimum entre chacun, arrêt de pauses café). Tout ce qui peut être fait à la maison (le marketing, le service client, la comptabilité…) l’est.”
MAGIC CIRCUS EDITIONS “En dehors du verre et de certaines pieces, comme notamment, les coupoles en laiton laqué de la collection Pop-Up (fabriquées en France par un carrossier réputé), la fabrication de nos modèles s’effectue principalement dans un atelier familial au nord du Portugal, une région qui a eu la chance d’être moins impactée. L’atelier est pleinement opérationnel. Nous pouvons stocker les luminaires là-bas si jamais les clients préfèrent attendre la fin du confinement pour recevoir leur commande. Pour le verre, nous possédons un important stock, ce qui facilite la production de nos pièces par les temps qui courent.”
Quelles précautions avez-vous mis en place ? Disposez-vous du matériel nécessaire (masques etc.) ?
ATELIER ARETI “La plupart des mesures demandées par le gouvernement allemand sont déjà en place dans nos manufactures au quotidien. Le travail du laiton exige une propreté exemplaire, sinon les pièces risqueraient d’être rayées. L’Allemagne n’encourage pas particulièrement le port du masque en ce moment, demandant aux sociétés de privilégier une distanciation et les gestes barrières.”
PEDRET “Nous essayons de utiliser des masques en permanence, mais il n’est pas facile d’en acheter en ce moment. Heureusement, nous en avions avant la crise dans nos ateliers, que nous réutilisons en les désinfectant.”
ENTRELACS “Avant la crise, nous utilisions déjà les masques ffp2 et les gants au quotidien pour nous protéger des poussières de bronze. Rien ne change… Mais nous nous sommes rapidement retrouvés en pénurie. Nous nous sommes alors reportés sur les masques utilisés pour la fonderie : cela ressemble à des masques à gaz, mais priorité à la protection !
Les gestes barrières bien sûr, pas de réunion, des personnes autonomes sur leurs ouvrages, et 1 seule personne à la fois dans le vestiaire!!! Nous avons aussi distribué à chacun des bouteilles individuelles de gel hydroalcoolique. Ils peuvent la laisser dans leur voiture, l’utiliser avant d’arriver à l’atelier, avant de revenir chez eux. C’est important que nos salariés se sentent supportés par l’entreprise, on leur doit bien cela !”
Quel est l’impact de la crise (délais de livraison / pièces plus difficiles à trouver) ?
PEDRET “Nous travaillons principalement avec des fournisseurs locaux et achetons plus de pièces que d’habitude afin de prévenir d’éventuelles ruptures de stock. En ce moment, nous avons quelques retards dans notre production, mais c’est limité à 1 à 2 semaines. Notre plus grand problème est que beaucoup de nos clients sont fermés et souhaitent annuler leurs commandes.”
ATELIER ARETI “Notre fabricant principal réalise l’ensemble des pièces nécessaires à la production de nos luminaires, mêmes les plus petits composants, en interne. Les matières premières viennent de la région, il n’y a pas de problème d’approvisionnement. Nos deux autres fabricants achètent parfois des pièces de l’extérieur, mais nous avons la chance qu’ils disposaient d’un très bon niveau de stock avant la crise. Notre principal souci est de transmettre assez de commandes à nos fabricants pour leur permettre de maintenir un niveau d’activité constant.”
Avez-vous d’autres points (anecdotes / idées / inquiètudes ) à partager ?
PEDRET “Nous travaillons avec des clients partout dans le monde et c’est la première fois (et j’ai un certain âge !) que je vois une situation similaire.”
ENTRELACS “Nous avions une commande en cours chez un fournisseur de fil électrique à Taiwan, nous leur avons demandé s’ils pouvaient nous envoyer des masques… Ils nous ont envoyé 300 masques, et gratuitement ! Ce sont plus que des fournisseurs à nos yeux, de vrais partenaires solidaires, merci à eux. Nous avons gardé 100 masques pour notre activité, et avons donné les 200 restants à un hôpital psychiatrique au Mans qui en manquait cruellement.”
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